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Ale

GosT - Prophecy



Genre : Darksynth

Pays : Etats-Unis

Label : Metal Blade Records

Date de sortie : 08.03.2024

 

Ma relation amoureuse avec GosT est probablement à sens unique, mais elle est sincère. Tout commence avec Valediction", en 2019, que je chronique sans réellement connaître l’œuvre du bonhomme. Un premier contact enthousiaste, l’album tranchant déjà avec l’offre synthwave classique, déjà devenue un poil convenu à l’époque. On y retrouve plus de sensibilité et de noirceur, et davantage dans le domaine du gothique romantique que du cyberpunk horrifique. Un virage pleinement assumé sur "Rites of Love And Reverence" et sa pochette sensationnelle empruntée à l’artiste néerlandaise Nona Limmen. L’album misait davantage sur l’ambiance et la brume, pour des titres glacés qui prennent leur temps. Ce qui fait de ce "Prophecy" un album attendu, mais qui suscite déjà des interrogations avant même de lancer le disque : une pochette digne de Worms Armageddon avec cette avalanche d’orange. Cette pauvre gargouille parait bien frêle et démunie face à la sensualité ensorceleuse de l’artwork précédent. Et parlons de ce changement de label : le légendaire Metal Blade, ancrant encore davantage la place de la synth dans l’univers et la communauté metal. On imagine deux cas de figure possibles : un changement très radical, ou une continuité dans la démarche, déjà pas loin d’être perfectionnée sur "Rites…" 

Le résultat est pour le moins étonnant. Exit les ambiances gothiques des deux opus précédents, on est sur un mutant totalement fou, qui semble presque synthétiser toute la synthwave et ses dérivés, pour des titres bi (voire tri)céphales. Les sons partent dans tous les sens, et se chamaillent pour gagner leur place. Le tout en parvenant malgré tout à sonner juste, et harmonieux surtout. La galette débute avec "Judgment", dont le paysage sonore semble autant témoigné d’une catastrophe que du démarrage d’une machine inconnue. On enchaîne directement avec la plage tutélaire, qui traduit à la perfection ce patchwork détonnant : un chant hurlé, strident et perçant, accompagné de sons de cloches, d’un foutoir électronique et d’une batterie en pleine roue libre… Fiou ! Quel package en cinquante secondes, qui se mutent bientôt en un rythme puissant, étrange, envoûtant et dansant malgré tout. Avant de se clore dans un spectacle fait d’échos et de rythmiques glaçantes. On n’en est qu’au début, et déjà on a l’impression d’avoir écouté trois ou quatre titres différents. Et bien, ça promet !

On ne pourra décemment tout décortiquer sous peine d’avoir une chronique interminable. Alors citons en vrac le fracas presque aggrotech sur "Death In Bloom", qui se mute presque en techno indus, voire en EBM ! Un pari également pris par Priest sur leur dernier album. Avant de devenir extrêmement lourd et lent, presque grungy. Encore un titre très métamorphique ! "Deceiver" est plus classique pour le genre… il faut bien contenter les fans de la première heure ! On est presque sur de l’horror-synth, comme récemment redécouverte avec Doctor Visor, ou certains titres de Mega Drive. "Obituary" est un peu du même acabit, mais y rajoute une boucle dansante à fond, un pur earworm ! Jusqu’à rebasculer dans l’horreur et la désolation, avec des nappes de synthé lointaines et lancinantes, et des kicks costauds !

"Decadent Decay" revient au chaos pur, avec ces cris caverneux et déchirants jonchant un titre de nouveau plutôt sautillant, rappelant quelque peu les débuts d’Oomph, tel leur titre "Ich Bin Du". Encore un passage EBM à la sauce synthwave, et absolument démentiel avec son rythme entraînant ! "Widow Song" à des allures de VR Sex avec sa voix douce et lointaine, noyée sous les effets, pour un groove doux-amer du plus bel effet. Avant de repartir dans un capharnaüm dévastateur. "Golgotha" revient vers une ambiance Mega Drive, avec son rythme mécanique effréné. "Digital Death" lorgne presque du côté de la noise, provocant un véritable vacarme assourdissant ! "Shelter" fait revenir les cloches, et le groove bondissant aussi. "Through The Water" est un nouveau mystère, débutant avec un piano timide et lointain… avant de rapidement faire revenir le pas mécanique des percussions, et la répétition féroce des riffs. On croirait presque entendre du Horshk cette fois ! "Leviathan" désarçonne à nouveau, avec son passage au silence total sans aucune transition… pour revenir vers les abysses, pour un ultime voyage mouvementé, ramenant vers les chœurs et l’atmosphère pesante de "Prophecy" qui débutait les hostilités. La boucle est bouclée…

Tout cela contribue à faire de ce "Prophecy" un album très riche, déroutant, fascinant et tout bonnement unique, surtout dans un genre bien saturé. On s’attendait à ce que GosT ait trouvé son rythme de croisière, sa niche, sa marque de fabrique… Mais finalement, on est encore désarçonné par un artiste qui se réinvente constamment, tout en gagnant chaque fois en maîtrise. Un must absolu pour quiconque se sentait lassé par l’offre proposée par la darksynth… et quiconque ayant encore un appétit pour ce style, une décennie après son explosion.



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