Le Poche de Béthune, l’une des salles les plus agréables de la région où la proximité avec les musiciens ajoute à l’intensité des concerts, accueille en ce jeudi 20 février trois groupes français réunis, pour simplifier, sous la bannière du post-hardcore.
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Les Lillois de DEAR LIARS lancent les hostilités. Ils offrent une demi-heure d’un hardcore assez groovy, comme sur "Cheval "ou "Knif Edge Beliefs", enrichi de passages rock à l’image de ce que propose CANCER BATS. Alors que le bassiste multiplie les poses et que le guitariste, en t-shit Pantera, reste concentré sur son jeu, le batteur assure l’essentiel de la communication. Il dédie ainsi "Burden", long morceau sombre et mélancolique, hargneux et colérique, habilement bâti, à un ami disparu trop tôt : "On a de la chance d’être en vie", assène-t-il. Le chanteur, dont la voix évoque parfois Maynard James Keenan, vibre au rythme de la musique et n’hésite pas à se mêler aux premiers rangs ; au Poche, la scène n’est pas surélevée. Ces trente minutes sont passées bien vite…
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ALTA ROSSA, fort de deux albums de très grande qualité, a livré une prestation impressionnante, vibrante d’une intensité constante, à peine troublée par "Dedale", accalmie instrumentale judicieusement placée en milieu de set. Sous des lumières souvent stroboscopiques, après une intro angoissante, le groupe enchaîne deux pépites de haine, un "Delusion" tout en furie dévastatrice, puis un "Exalted Funeral". à la haine très black metal. Post hardcore coloré de sludge, la musique des Bisontins glisse tantôt vers une lourdeur inquiétante, insidieuse qui aguiche avec son groove avant de mordre à la carotide ("The Art of Tyrant"), tantôt vers la rage pure, apocalyptique ("From This Day On). Les jeunes gens du public se lancent dans des pogos en toute cordialité, bientôt rejoint par le chanteur sous l’œil impassible d’un bassiste et d’un guitariste comme happés, possédés par les notes qu’ils assènent. La plongée dans des abîmes tumultueux et asphyxiants s’achève avec "Stardrainer "et "Void Of An Era", titres au cordeau tirés du premier LP de la formation, conclusion dérangeante d’une prestation douloureusement envoûtante.
Pas facile ensuite, même à domicile, pour JUNON d’enchaîner… mais les Nordistes ont l’expérience et le talent pour assumer leur position de tête d’affiche. Habitués des scènes du Pas-de-Calais, les six compagnons ne déçoivent pas et offrent un concert riche d’une folle énergie. Les gaillards sont ravis d’être sur scène… et le montrent ! Sourire aux lèvres, ils affichent une belle complicité et n’hésitent pas à se mêler au public pour la plus grande joie de spectateurs tout acquis à leur cause. Ils présentent même un nouveau morceau, "Morning Star", qui laisse penser que son avenir s’écrira en lettres flamboyantes.
Énergie et vitalité certes, mais, surtout, compositions solides, à l’image d’un "Carcosa" protéiforme, rivière qui ne cesse de changer, de se métamorphoser de torrent en long fleuve impassible. La puissance née des trois guitares et d’une basse très présente offrent aux chansons une lourdeur menaçante et complexe ("Segue 1 - The Final Voyage") qui disparaît parfois, gangrené par un explosion de haine. Tels sont "The Day You Faded Away" qui révèle vite son féroce appétit de destruction, ou la déferlante hardcore "Another Bar In Your Cage". Un visage avenant devient ainsi, en un clignement d’œil, un masque de peur, à l’image des vocaux qui naviguent entre growls et chant clair. Naissent ainsi forte tension et menace sourde, comme sur le douloureux "Out Of Suffering" vibrant d’un écho malsain et poisseux.
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