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Genre : Black Metal
Pays : Pologne
Label : Szataniec
Date de sortie : 29.02.2024
Avec cette belle pochette mélangeant les tons chauds et froids dans un déluge de pastel aux reflets bleu-rose néon, et mes lointaines origines polonaises (un peu perdues en cours de route, je dois bien le dire) : Lilla Veneda avait de quoi titiller ma curiosité, bien qu’officiant dans le genre du Black Metal, avec lequel je suis si peu familier. "Fury Dimension", qui ouvre l’album, vient d’emblée refaire ma culture sur ce que le black metal peut être. Exit les cris caverneux et les ambiances décharnées : ici on a du coffre, du muscle, de la patate ! Le chant est growlé bien sûr, mais couplé à la musique, il ressemble plus au râle d’une bête féroce qu’une lointaine plainte gémissante (et je n’ai rien contre les lointaines plaintes gémissantes, ça donne des atmosphères sympas). Mélodieux, puissant et groovy, ce premier jet s’écarte en tout cas pas mal de la préconception que je pouvais avoir du black… et ce n’est pas forcément un mal !
"Sleeping Knight’s Sky" revient un peu plus vers du classique, slalomant entre les atmosphères sombres et d’autres plus mélodieuses. Le tout avec une énergie dévastatrice bien entendu, supplantée que partiellement par ces passages où les instruments dominent. "Biomechanic Algorithm" aurait été un nom d’album qui claque pour un projet indus, mais en guise de titre black avec son ambiance lugubre et glacée… C’est plutôt raccord aussi pour s’approprier le genre développé par le papa d’Alien ! On y rajoute quelques sonorités lointaines et éthérées, et même un petit air de guitare tout paisible en fin de parcours… Et on a clairement le titre phare de l’album, atmosphérique à souhait.
Quoique niveau atmosphère, le côté "ruines oubliées" du titre "Iron Black Pestilence" est pas mal dans le genre, même si cette ambiance est rapidement envoyée dans le mixer pour un capharnaüm mastoc et véloce, bien craspec et violent ! L’ambiance Tomb Raider des débuts se voit remplacée par un côté "train fantôme" aux 2/3 environ, avec ces rires de sorcières… Étrange, mais pas déplaisant pour ce titre jouant avec le tempo pour mieux revenir avec une grêle de vacarme ! "Scratched Crown" et ses riffs simples et répétitifs n'est pas mal non plus, devenant véritablement hypnotique au bout de ses quasi-quatre minutes. "Colossi" est une autre petite prouesse musicale, où la guitare parvient à pénétrer nos tympans et nos méninges pour se greffer à notre mémoire, avec quelques sons distants semblant évoqués une cathédrale ou autre prodigieux édifice, d’autant plus évident lors du pont. "Immortal Vision of Chaos", comme son nom semblait l’indiquer, est un joyeux bordel bien pétaradant. Bien qu’il ne déroge pas totalement à son côté atmosphérique et hypnotique, avec ses voix lointaines, semblant provenir d’enregistrements, et ses instruments toujours aussi bons pour nous mettre en trance…
Tout cela est déjà de très bon augure, mais on est loin de la maestria d’ambiance pesante qu’est l’intro de "Primordial Movements" (la chanson, pas l’album !), remplacée un peu rapidement malheureusement par un retour du gros bordel foutraque ! Ce qui ne rend pas cette puissance iconoclaste désagréable, que du contraire. C’est super spécifique, mais on croirait y retrouver un peu de "Funhouse Bloodbath" de Rocky Gray ! On retrouve à nouveau l’accalmie prodiguée par une discrète guitare, aux 2/3 du titre à nouveau. De quoi finir sur une note plutôt moody, bien que les riffs demeurent puissants en arrière-plan… jusqu’à revenir au centre de l’attention pour clore véritablement le morceau avec perte et fracas ! Enfin, "Pytasz Co W Moim Zyciu" (à vos souhaits) revient vers le classicisme, comme "Sleeping Knight’s Sky", avec son tempo largement plus lent, ses instruments plus doux, et sa voix alternant entre le chuchotement inquiétant et le growl monstrueux. Une fin en relative douceur, si ce n’est pour un petit pic ultime de puissance rageuse à la toute fin. Juste histoire de dire qu’on ne referme pas l’album avec calme et volupté…
Vous l’aurez compris, cette chronique est à prendre avec des pincettes, puisqu’elle émane de quelqu’un pas franchement calé dans le genre. Mais justement : s’il a autant plu à un novice, peut-être pourra-t-il plaire, voire surprendre l’afficionado. Loin de l’image DIY (voire parfois cheapos) de bien des représentants du genre, et misant un peu moins sur l’ambiance cauchemardesque pour au contraire y inclure un peu de peps… Ce nouvel opus de Lilla Veneda aurait bien de quoi désarçonner le fan absolu. A vous de voir si c’est bien ou mal !