Genre : Post-Hardcore
Pays : France
Label : Autoproduction
Date de sortie : 16.04.2024
Cinq ans après leur premier album, le quintet français revient nous livrer une salve de gros post-hardcore bien sentimental et revêche. Il y a bien eu une escale live entre deux, histoire de patienter pendant le confinement, mais le groupe a sans doute préféré prendre bien son temps… Et ce n’est pas plus mal, face à la belle brique de presque une heure qui se dresse devant nous. Six titres, tous longs, introspectifs et abrasifs, traitant d’émotions puissantes dans la douleur. On a donc du pain sur la planche pour ce second bébé de Vesperine, dont la genèse mérite de jeter un œil curieux, tant le groupe intellectualise sa démarche.
La galette commence avec "Tant qu’il y a de l’espoir"… un titre intriguant, d’autant plus qu’on commence directement par une sacrée cacophonie. Le chant vient s’y joindre rapidement… et on n’est guère plus rassurés. Ce sont des hurlements étouffés qui viennent ponctuer les instruments, bien décidés à ne pas se calmer. Lorsqu’à la presque moitié du titre, le tempo décélère un chouïa… On reste dans une ambiance mortifère, glaçante et chaotique. C’est plutôt l’énergie du désespoir qui anime le groupe, pour ce titre fougueux et triste. Lorsque le titre s’achève, il reste encore trente bonnes secondes, comme pour mieux nous laisser le temps de digérer la pure destruction à laquelle nous avons été témoins… Et c’est le premier morceau !
"Universelle Liesse" reprend là où s’arrêtait le titre précédent, et propose une intro bien bien longue. Les instruments sont minimalistes, et semblent faire monter la sauce d’un pas lent mais décidé, instiguant une atmosphère lugubre, tailladée par le chant, tranchant comme un rasoir. Le titre évolue lentement et froidement, jusqu’à proposé un silence au milieu… perturbé uniquement par une voix devenue douce et claire, et quelques discrètes notes de guitare, presque gênées de se montrer. Pour mieux revenir à la décadence et à la douleur. Le chant reste clair, mais se montre déchirant, comme ne pouvant contenir ses hurlements tortueux, tandis que les instruments frappent tels des marteaux colériques. Une fois encore, et ça va devenir habituel, le titre se termine presque timidement… pour mieux reprendre sa triste mélodie sur le suivant.
"Á Cœur Joie" utilise encore le chant clair, et cette fois dans un français bien discernable ! On ne va pas vous le dire à chaque fois… L’ambiance est moribonde, plus déprimante que réellement énervée. Et la longue intro profite de l’opportunité pour se montrer à la fois généreuse et hypnotique, nous plongeant dans une trance macabre douce-amère, contant une histoire que l’on imagine tragique, bien qu’absconse. Un pur slow-burn qui se révèle de plus en plus sombre et glacé. En fait, c’est même plus justement un oxymore givre-feu qui se présente à nous, avec d’un côté la force ardente des paroles, et de l’autre l’atmosphère tétanisante que le titre nous offre. Et même LES atmosphères…avec presque un quart d’heure au compteur, il y a de quoi jongler et nous raconter un véritable récit effroyable, prenant plusieurs virages pour nous permettre de reprendre (un peu) notre souffle, sans jamais nous faire entrevoir la lumière. Il se termine presque sans prévenir, nous plongeant dans un profond silence, semblant duré une éternité. Même lorsque le titre suivant ("Le Poids Du Silence") commence, la frêle guitare qui se remet à jouer vient donner tout son sens au titre… Qui prend encore allègrement son temps pour faire peu à peu revenir chaque musicien, dans une accalmie pratiquement tout en allégresse. Vous vous doutez que c’est pour mieux exploser en milieu de parcours… n’est-ce pas ? Mais ces deux titres mis ensemble sont pourtant d’une puissance inouïe, d’un symbole évident et pourtant très fort. Vous vouliez une éclaircie ? La voilà… Très savamment placée et dosée ! "Interférence" joue encore de cette lutte entre lumière et ténèbres, débutant par des aboiements furieux pour rapidement se muter en écrin de fragilité. Une chanson véritablement bicéphale, où des sentiments contraires cohabitent et clament leur existence. "Mauvaise Herbe" distille tout ça, pour débuter une fois encore d’un pas lent et inquiétant, avec un chant calme et frêle. Le rythme ne s’emballe jamais vraiment, préférant se montrer distant, constant et froid, alors que le chant continue son combat interne entre maux et espoir…
Sans vouloir faire mon mélomane pseudo-intello, il n’est pas facile d’accès ce "Perpétuel" ! Tant par ses textes que par sa teinte vantablack, grondant sa profonde et pénible colère (presque) sans discontinuer. Mais sous les rugissements se cache un album résolument beau. Assourdissant, mais magnifique. Peut-être qu’elle ne sera pas évidente à la première écoute… Mais on vous invite à pousser, quitte à prendre des pauses : la poésie macabre de Vesperine est devenue rare et précieuse.